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Décryptage de l'attention : partie 2

Dernière mise à jour : 17 avr. 2023

Le vagabondage de la pensée

Par Louise Perche

Saviez-vous que pendant 47% du temps, nos pensées ne seraient pas focalisées sur la tâche que nous sommes en train de réaliser ? (Killingsworth & Gilbert, 2015) Aujourd'hui dans l'article Décryptage de l'attention du Mag, on vous propose de parler d'un phénomène répandu mais peu nommé : le vagabondage de la pensée.


Vous avez forcément déjà expérimenté ce moment lors d'une tâche où votre attention a soudain été attirée vers d'autres thématiques qui n'ont pas franchement de lien avec votre tâche principale. Souvenez-vous de cette fois lors d'un Webinar où vous vous êtes retrouvé.e à planifier votre liste de course, ou bien cette autre fois en faisant votre comptabilité où vos pensées se sont échappées vers la destination de vos prochaines vacances…


Nous décryptons pour vous les caractéristiques du vagabondage de la pensée, ses inconvénients et… ses bénéfices. Vous découvrirez aussi dans cet article comment articuler vos séquences d'apprentissage pour permettre à vos apprenants d'éviter de vagabonder.


Les différents types de distractions

Il existe différents types de distractions en fonction de leur orientation vis-à-vis de notre environnement. Ainsi, des distractions provenant directement de l’environnement comme une notification, une sonnerie de téléphone ou un bébé qui pleure, sont catégorisées comme des distractions externes.

A contrario, des pensées à propos de notre week-end, notre liste de course ou des prochaines choses à ranger chez nous entrent dans la catégorie des distractions internes si elles ne sont pas en lien avec la tâche que nous réalisons.

Toutes ces distractions ont un point commun : elles capturent notre attention sur un autre objet que notre tâche principale. La problématique des distractions est qu'elles maintiennent notre attention sur cet objet distracteur ce qui nous empêche de retourner à notre tâche principale après avoir été distrait.e.


Autrement dit, une fois que notre attention a été capturée par le distracteur, il nous faut beaucoup de ressources cognitives pour réallouer notre attention sur la tâche principale, et c'est bien là le cœur du problème !


Aujourd'hui on s'intéresse à un type tout particulier de distractions: le vagabondage de la pensée.

Le phénomène de vagabondage de la pensée

Le vagabondage de la pensée est une situation dans laquelle notre attention s'éloigne d'une tâche primaire pour se concentrer sur le traitement d'objectifs personnels. (Smallwood et Schooler, 2006)


Comment savoir qu'il s'agit bien de vagabondage de la pensée ?

Le vagabondage de la pensée est caractérisé par différents critères.


1. L'attention est capturée par des pensées sans lien avec la tâche principale

2. Le vagabondage de la pensée apparaît le plus souvent sans conscience ou sans intention

3. Lors de vagabondage de la pensée, l'attention est déconnectée de la perception. Ce phénomène est appelé découplage perceptif. Autrement dit, nous sommes déconnectés de ce qui se passe dans notre environnement, ce qui rend d'autant plus difficile le retour à la tâche principale. (Schooler et al. 2011)

Emergence du vagabondage de la pensée

Certaines situations ont tendance à faire émerger plus facilement le vagabondage de la pensée. Par exemple, des tâches peu coûteuses cognitivement (Smallwood et Schooler, 2006), lorsque l'on ressent de la fatigue, du stress, de l'ennui ou lorsque l'on consomme de l'alcool (Mooneyham et Schooler, 2013).

Conséquences du vagabondage de la pensée

Souvenez-vous, dans un autre article, nous vous avions parler des capacités limitées de notre système cognitif. En effet, notre attention ne peut être focalisée que sur un objet à la fois. Dans le cas du vagabondage de la pensée, l’attention est alors focalisée sur nos pensées internes et non plus sur la tâche principale. Dans le cas de la formation, l’attention n’est donc plus focalisée sur le contenu du cours, ce qui a des conséquences sur les performances d’apprentissage.


Le vagabondage de la pensée a donc diverses conséquences négatives en situation d'apprentissage. En effet, selon les études, les apprenants qui vagabondent plus auraient tendance à avoir de moins bonnes performances de compréhension de texte (Mooneyham et Schooler, 2013). Ils prennent également moins de notes et ont de moins bons scores aux tests de rappels après les cours (Spuznar, Khan et Schachter, 2013).

Bénéfices du vagabondage de la pensée

Pourquoi notre esprit passe-t-il 47% de son temps à vagabonder si cela est si délétère pour nos performances ? Le vagabondage de la pensée n'aurait en effet pas que des effets négatifs. Il existe trois grands types de bénéfices au vagabondage de la pensée:



La créativité : en effet, le vagabondage permettrait d'augmenter la créativité à apporter de nouvelles solutions à d'anciens problèmes (Baird et al. 2012)





La planification : en étudiant le contenu des pensées qui ont lieu pendant le vagabondage, les chercheurs se rendent compte que dans environ 50% des cas, nos pensées sont tournées vers le futur (Mooneyham et Schooler, 2013). Quand nos pensées vagabondent, c'est le plus souvent pour nous aider à planifier, ordonner, lister ce qui va se passer dans notre futur (c’est l’exemple de l’élaboration de votre liste de course pendant le Webinar)



Ennui et stress : lors d'une tâche ennuyeuse ou stressante, vagabonder nous permettrait de voir le temps passer plus vite. Ainsi, c'est une solution trouvée par notre système cognitif pour nous désengager de certaines tâches momentanément sans pour autant les abandonner totalement. (Mooneyham et Schooler, 2013). Par exemple lorsque vous vous ennuyez en formation, il apparaît moins négatif pour vous de vagabonder pendant un certain temps, le temps de vous ré-intéresser à la situation d’apprentissage, plutôt que d’abandonner totalement la formation.


Vagabondage de la pensée et situations d'apprentissage


Le vagabondage de la pensée est coûteux : en ressources cognitives, en compréhension et en performances… Cependant, il aurait aussi une fonction évolutive qui nous permettrait de nous échapper de l’ici et maintenant lors de certaines situations afin de résoudre d’autres problèmes; de planifier notre vie ou d'éviter d'abandonner une tâche.




Comment utiliser au mieux le vagabondage de la pensée dans le cadre des apprentissages ? Quelles recommandations peut-on en tirer pour la conception de séquences d’apprentissages ? Et bien l'un des principaux leviers pour éviter aux apprenants de vagabonder est de diversifier vos pratiques pédagogiques (Mooneyham et Schooler, 2013) !

Et oui, plus vous aurez planifié le séquençage de votre formation, plus vous permettrez aux apprenants d'avoir des opportunités de détecter que leur attention a été capturée par des pensées sans lien avec la tâche et de revenir à la thématique principale de votre séquence. Voilà pourquoi il est essentiel de bien structurer et scénariser vos formations !

Notez tout de même que dans certains cas, favoriser le vagabondage de la pensée des apprenants semble être une piste intéressante, par exemple s'ils doivent résoudre un problème complexe, pour favoriser leur créativité grâce au vagabondage (Baird et al. 2012) … à méditer donc en attenant le prochain article du Mag !


La Team IfisLab


Bibliographie



Baird, B., Smallwood, J., Mrazek, M. D., Kam, J. W., Franklin, M. S., & Schooler, J. W. (2012). Inspired by distraction: Mind wandering facilitates creative incubation. Psychological science, 23(10), 1117-1122.

Killingsworth, M. A., & Gilbert, D. T. (2010). A wandering mind is an unhappy mind. Science, 330(6006), 932-932.

Mooneyham, B. W., & Schooler, J. W. (2013). The costs and benefits of mind-wandering: a review. Canadian Journal of Experimental Psychology/Revue canadienne de psychologie expérimentale, 67(1), 11.

Schooler, J. W., Smallwood, J., Christoff, K., Handy, T. C., Reichle, E. D., & Sayette, M. A. (2011). Meta-awareness, perceptual decoupling and the wandering mind. Trends in cognitive sciences, 15(7), 319-326.

Smallwood, J., & Schooler, J. W. (2006). The restless mind. Psychological bulletin, 132(6), 946.

Szpunar, K. K., Khan, N. Y., & Schacter, D. L. (2013). Interpolated memory tests reduce mind wandering and improve learning of online lectures. Proceedings of the National Academy of Sciences, 110(16), 6313-6317.





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